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Sébastien Thoen, “action discrète”

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EntretienTrublions du paf, les membres d’Action Discrète sévissent chaque semaine sur Canal Plus dans des parodies corrosives souvent controversées. Sébastien Thoen, homme du gang, joue avec le second degré jusque dans ses réponses aussi déconcertantes que percutantes. Attention, onde de choc garanti !


« Eric Besson n’est pas que Ministre, il est comique il faut le savoir ! »

Lorsque déguisés en policiers, vous avez proposé aux Calaisiens l’adoption de faux sans-papiers tenus en laisse ou lorsqu’en partisans de la Frêche Touch » dans les rues de Montpellier vous vous êtes attirés les foudres de plusieurs associations. Vous vous dites à posteriori aller trop loin ?

Aller trop loin c’est très subjectif. Pour le sketch sur Georges Frêche et son franc-parler, nous serions allés trop loin si l’on avait tourné la scène à Perpignan. Ce que nous avons fait, c’était offrir une caricature du personnage pas un acte gratuit. Nous utilisons le réel, un contexte particulier et c’est ce qui a de l’impact. Une simple caricature de Frêche a moins de portée que de se rendre à Montpellier en se faisant passer pour des militants du personnage en caméra cachée. Cela offre une confrontation avec le réel. À Montpellier, Frêche est un parrain et tout le monde a peur de lui. Les gens se sont lâchés et lorsque nous leur avons dit que c’était pour un sketch, ils étaient contrariés, mais personne n’a osé faire machine arrière. De toute façon, Georges Frêche on le connaît bien, c’est un pote et tout ce qu’on voulait, c’est qu’il soit réélu.

Et pour Calais ?

Là, c’est une autre histoire, nous avons voulu marcher sur les plates-bandes d’Eric Besson. Eric Besson n’est pas que Ministre, il est comique il faut le savoir. Il a filmé un super sketch lorsqu’il a fait sauter la jungle devant les caméras de TF1. On a vu ça et l’on s’est dit : Ok mec, nous on va faire plus drôle ! C’est la vérité qui est cruelle, c’est tout. Nous ne sommes que des trublions qui essayent de faire rire. Nous n’avons pas la prétention de faire passer un message. La preuve, dans le groupe, il y a un communiste qui tend vers le centrisme, un bouddhiste, un fasciste, un de l’UMP qui est fan de Villepin, un autre complètement athée. On ne Frêche donc pour aucune paroisse !

Pierre Desproges disait que l’on peut rire de tout mais pas avec tout le monde, cette citation s’applique t-elle encore plus à l’humour aujourd’hui ?

Nous, Desproges, on aime pas du tout. C’est mieux que Gad Elmaleh, mais nos comiques préférés restent Frédéric Lefebvre ou Jacques Chirac. Le problème actuellement, c’est qu’on ne peut pas rire du tout ! Après, l’humour reste quelque chose de très personnel. Moi, par exemple, j’avais un hamster qui s’est fait écraser par la voiture de Chevènement. Il sortait de l’Assemblée nationale alors que je me baladais aux invalides avec mon hamster. Et hop, plus rien ! Si aujourd’hui, on me fait une blague sur ce petit animal, je vais très mal le prendre. J’ai subi un traumatisme. Donc, lorsque ça te touche directement, cela appuie sur le point sensible et là, tu es vulnérable. Après, évidemment qu’il faut rire de tout. Il y a peut-être des sujets tabous, mais nous sommes là pour les faire sauter !

Stéphane Guillon vient d’être licencié de France Inter. Votre point de vue ?

Je pense que c’est une feinte de sa part comme Didier Porte d’ailleurs. Ce sont des mecs qui ont un certain talent, même si je n’aime pas trop. Ils savent très bien que la fréquence dans ce métier est terrible. Lorsque tu écris des blagues tous les jours, c’est très compliqué de rester drôle. Guillon savait qu’en continuant à ce rythme, il serait vite devenu nul. Ce licenciement est donc un truc manigancé avec l’accord de France Inter.

Subissez-vous des pressions de la part des politiques ou de la direction de Canal Plus ?

Il y a une dizaine de validations avant la diffusion à l’antenne, mais le sketch sur Georges Frêche est l’un des rares que l’on n’avait pas montré. Notre chance, c’est que les autorités nous aiment bien. On a des fans au gouvernement ! Nous sommes un mal nécessaire pour les politiques. Nous sommes potes avec les anciens des renseignements généraux qui nous donnent des tuyaux pour aller dans les manifestations et nous protègent lorsque ça tourne mal. Notre Objectif est d’être un lien entre Le Canard Enchaîné et Voici !

Les joueurs de l’équipe de France qui refusent de s’entraîner au mondial et Domenech qui se voit obligé, tel un otage, de lire les revendications de ses joueurs, ça va encore plus loin qu’un sketch d’Action Discrète non ?

Heureusement qu’on ne s’est pas rendus en Afrique du Sud, il aurait été impossible d’être plus drôles qu’eux. Qu’ils décident de ne pas s’entraîner, personnellement je m’en fous ! Mais qu’ils choisissent de ne pas jouer les matches du mondial, c’est une autre histoire ! Anelka n’a pas de cerveau et c’est un mauvais footballeur, mais ce qu’il a dit à Domenech (rapporté en une du journal l’équipe) tout le monde en rêvait !

Vous vous êtes retrouvés en une du journal La Croix, pouvez-vous nous expliquer cet incroyable concours de circonstances ?

C’était génial ! Il y avait une manifestation CGT gare Saint Lazare et nous nous sommes fait passer pour des militants. Notre but, égayer la grève ! On a proposé des quiz, des ateliers frisbee ou encore chenille. Les usagers devenaient fous ! Une photographe indépendante qui couvrait l’événement est passée et a fait un cliché de nous, croyant voir de vrais grévistes. Elle est partie avant que les gars de la CGT ne s’aperçoivent du manège et ne mettent fin au sketch. La photographe a mis ses images en ligne et nous avons été choisis par La Croix pour la couve sans qu’ils ne se doutent de rien. Un matin, j’ai reçu un texto d’un pote qui me disait: « Si tu dois acheter La Croix une fois dans ta vie, c’est aujourd’hui ! » Cela reste un super souvenir !

Vos sketches sont souvent un pamphlet contre les journalistes. Quel est votre point de vue sur les media en général ?

On déteste les journalistes, surtout ceux de la gauche caviar donneurs de leçons comme Libération ou Marianne. En même temps, on fait aussi partie des médias donc il ne faut pas trop se la raconter. Je trouve qu’il y a trop d’infos, trop de comiques et pas assez de plombiers ou de maçons. C’est le problème d’une société qui marche sur la tête. Moi je dis respect aux chirurgiens, aux plasticiens, aux cordonniers et aux sans papiers qui vendent des ananas à 1€ dans le métro. Ce sont eux les vrais héros !

C’est jouissif d’insulter la police sans être emmené au poste ?

C’est un sketch que l’on avait tenté des dizaines de fois et il ne fonctionnait jamais car les flics nous reconnaissaient. Un jour, on l’a retenté pour une thématique « spécial police » et, incroyable, il a fonctionné du premier coup. C’est le genre de truc que tu pourrais faire avec des potes à 5 heures du matin en sortant d’un club échangiste. Cela n’a aucun intérêt, aucun message si ce n’est de nous faire marrer. Mais attention, les flics sont nos amis ! Ceux que l’on déteste vraiment, ce sont les taxis et les cafetiers que l’on ne va pas tarder à se farcir ! En fait, nous ne sommes vraiment pas des rebelles puisqu’on se plaît à taper sur des gens de proximité. La république ne va pas s’envoler à cause d’Action Discrète !

Sébastien Thoen fan de porno ou de Brigitte Lahaie ? (Sébastien a écrit Brigitte & Moi, en compagnie de Nicolas Castro)

Surtout fan de Giscard dont on parle beaucoup dans le film ! En 70, les premiers réalisateurs de porno étaient des anciens révolutionnaires qui avaient compris que la lutte des classes ne passait plus par la rue, mais par le X. La petite servante de province qui balaye la journée pour ses patrons friqués et qui, le soir venu, s’envoie en l’air avec eux ! Ce film, c’est l’histoire de la France entre 68 et 81. Bref jusqu’à la fin de ce pays, l’arrivée de Mitterrand au pouvoir.


Jean-Éric Ougier, pyrotechnicien

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