Entretiens Musique

Anne Gastinel, je joue donc je suis…

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La relation qui lie Anne Gastinel à son instrument est née d’un coup de foudre, genèse d’une relation fusionnelle où, dans une parfaite osmose, le corps et le bois ne font plus qu’un. À quatre ans, c’est d’ailleurs, au-delà de la musique qui nimbait son environnement familial, vers ce violoncelle que la petite fille a été irrémédiablement attirée, happée même. Cette fusion organique entre l’interprète et son instrument, on la retrouve dans le jeu d’Anne Gastinel, qu’il se décline en soliste, chambriste ou dans des œuvres orchestrales. Professeure au conservatoire national supérieur de Lyon et concertiste, la violoncelliste fait montre d’un enseignement et d’un style qui mêlent la rigueur d’une sacralisation du texte à un souffle de liberté qui prend racine dans la pédagogie de ses maîtres.

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« Petite, je ne me disais pas que je serais musicienne mais violoncelliste. »

Beaucoup d’artistes ont été quelque peu figés par cette situation de confinement, de restriction des libertés, par une absence de concerts sans réelles perspectives. Comment avez-vous vécu cette année toute particulière dont on semble voir enfin le bout du tunnel ?

Je crois comme beaucoup, de manière quelque peu chaotique avec des hauts, des bas, des moments de découragement. Même si la musique pour soi permet de garder le cap, il faut reconnaître que cette attente d’un retour à une vie normale commence à peser. J’ai heureusement la chance d’enseigner, ce qui me permet de garder un lien avec la musique vivante, d’avoir pu enfin retrouver mes élèves après une période de cours en visio là aussi compliquée. Même si l’on pâtit toujours d’un manque de concerts, cette activité régulière d’enseignement qui me donne la possibilité d’entendre ces jeunes jouer me fait beaucoup de bien. Ça me maintient en vie musicalement !

Pour revenir à votre parcours musical, vos parents ont tous deux enseigné au conservatoire de Lyon, votre maman ayant même je crois eu pour élèves, entre autres, Pierre-Laurent Aimard, Roger Muraro ou Jean-Yves Thibaudet. Peut-on parler de véritable filiation, d’émulation familiale puisque l’on retrouve parmi vos quatre frères et sœurs des altistes et des violoncellistes et ce même si vous avez toutes et tous débuté la musique par le piano ?

C’est vrai qu’il y a eu dès le départ un petit côté Obélix où je suis, de par mon environnement familial, tombée dans la marmite dès mon plus jeune âge. Il y avait de la musique tout le temps à la maison et on en faisait comme on respirait. C’était quelque chose de tout à fait naturel. Comme on possédait quatre pianos et que beaucoup d’élèves pianistes venaient prendre des cours, c’était donc l’instrument central au cœur de toutes les attentions. Je suis d’ailleurs ravie d’avoir pratiqué le piano car cela apporte un éclairage, une écoute plus harmonique qui a forcément influé sur ma manière d’aborder le violoncelle. Il est d’ailleurs à noter qu’aujourd’hui encore le piano est certainement l’instrument que j’écoute le plus, que ce soit sur disques ou bien encore lorsque je vais en concert. 

Photo : William Beaucardet

Le violoncelle et vous, cela a-t-il été un véritable coup de foudre ?

Totalement ! J’ai toujours été attirée par cet instrument et j’ai comme ça des souvenirs de ma sœur ainée qui jouait beaucoup et que je regardais pendant des heures. J’étais fascinée, envoutée même par le son du violoncelle et ce rapport si particulier à l’instrument. Cet envoutement s’est d’ailleurs confirmé lorsque j’ai moi-même débuté la pratique de cet instrument qui, dès le plus jeune âge, s’est tout de suite avéré un jeu, un réel plaisir et jamais quelque chose que je considérais comme un devoir, un travail. J’avais cette délicieuse sensation de faire corps avec l’instrument, sensation certainement décuplée par le fait que je pratiquais en même temps le piano qui, à quatre ans, m’apparaissait beaucoup plus comme un gros meuble qu’autre chose. Le violoncelle, on l’enlace et il y a en cela un rapport dès le départ presque organique. Je me souviens avoir débuté sur un tout petit violoncelle que je considérais réellement comme mon compagnon de jeu. Je voyais l’apprentissage de l’instrument comme quelque chose de très ludique.

Vous avez débuté, comme vous le notiez, le violoncelle très jeune, à quatre ans. Pour beaucoup de musiciens, c’est l’amour de la musique qui amène à l’instrument ; vous concernant on a l’impression que c’est le chemin inverse qui s’est opéré ?!

C’est effectivement l’instrument qui m’a amené à la musique. J’ai d’abord eu cette attirance toute particulière pour le violoncelle ; ce qui fait que je ne me suis jamais posée de questions quant à savoir le métier que je ferais. Petite, je ne me disais pas que je serais musicienne mais violoncelliste. La musique faisant partie de mon quotidien, ce n’est pas un compositeur, un concert ou une œuvre qui a agi comme un facteur déclencheur mais vraiment cette irrésistible attirance pour ce merveilleux instrument. Ce n’est qu’ensuite que j’ai vraiment découvert la musique et m’y suis plongée.

Est-ce le rapport physique, cette osmose très particulière entre vous et le violoncelle qui vous a séduit et comment qualifieriez-vous cette relation qui vous unit à votre instrument et qui se façonne avec le temps ?

Cette relation évolue effectivement avec le temps et également parce que de fait, on change de compagnon de voyage au fil des années. En même temps, j’ai cette impression que l’on refait un peu l’histoire. J’ai par exemple cette sensation d’avoir grandi avec mon violoncelle, même si effectivement, au fil de ma vie, j’ai changé d’instrument. Le violoncelle étant un merveilleux moyen d’expression au-delà des mots, cela crée une relation où le lien physique et spirituel prend une forme assez irrationnelle. Je crois d’ailleurs qu’à ce titre, tous les instrumentistes à cordes sont quelque peu dépassés par le côté objectif de l’instrument à qui ils prêtent vie. Je parle souvent à mon violoncelle tout en sachant que c’est totalement déraisonnable (rires). Il n’empêche que le lien qui m’unit à lui est indéniablement très particulier.

Photo : Julien Mignot

Et il vous répond parfois ?

Il me répond à sa manière. Il y a des jours où il est de mauvaise humeur et me le fait savoir. Mais généralement, il faut bien reconnaître qu’il a bon caractère et est, comme on dit, de bonne composition.

Est-on dans son jeu le reflet de sa propre personnalité ?

Absolument. Chaque artiste exprime ce qu’il est. On peut certes développer des comportements extérieurs qui ne correspondent pas forcément à qui l’on est, par contre dans le jeu on ne peut pas mentir. Je suis intimement convaincue que c’est dans ce rapport avec l’instrument et par le prisme de son jeu que l’on est le plus vrai, le plus à nu ; la personnalité de chaque interprète s’exprimant là en toute transparence.

Est-il justement aisé d’avoir le recul nécessaire pour analyser les caractéristiques de son propre jeu ?

On apprend avec l’âge, l’expérience mais c’est effectivement un exercice assez compliqué. Lorsque l’on a pas mal enregistré, on apprend à s’écouter d’une autre manière. Après, avoir le recul nécessaire pour s’analyser est forcément une chose très difficile. Être à la fois auditeur et acteur de ce que l’on fait n’est pas une évident et il est plus simple de s’adonner à cet exercice avec des étudiants qui, justement, vous obligent à vous regarder un peu différemment. Ces derniers participent en cela à une meilleure écoute de soi-même.

Vos professeurs qu’il s’agisse de Patrick Gabard, Jean Deplace puis plus tard au conservatoire national de Paris, Philippe Muller, vous ont, je crois, laissé une grande liberté dans leur approche pédagogique. Aujourd’hui enseignante, pensez-vous qu’il est important de laisser une latitude à l’élève afin de le laisser grandir tranquillement pour qu’il suive son propre chemin ?

J’en suis convaincue. J’ai eu la chance d’avoir des professeurs qui m’ont guidée sur des rails tout en me laissant un grand champ de liberté que j’essaye de perpétuer à ma manière avec mes étudiants. Ce qui me fascine, c’est la personnalité de chacun et cette variété quasi infinie de ce qui peut être proposé de la même œuvre, sachant par ailleurs que je suis intransigeante quant au respect du texte. Dans l’enseignement, ce qui m’intéresse le plus, c’est d’accompagner mes étudiants dans le chemin qu’ils ont choisi. Parfois, ils n’en sont eux-mêmes pas très sûrs alors on creuse afin de savoir s’ils préfèrent prendre à droite, à gauche ou encore continuer tout droit ! C’est ce côté vivant qui me galvanise, me porte. Proposer des cours où l’on dirait : « Fais comme moi et ça sera très bien ! » revêt un aspect très sclérosant et pauvre. Après, bien sûr, l’équilibre n’est pas toujours aisé à trouver entre ce cadre dont ils ont besoin et qui s’avère primordial pour ne pas se perdre en chemin et cette liberté nécessaire pour se construire en tant qu’interprète. Ce qui me passionne, c’est de les guider justement afin qu’ils trouvent leur propre personnalité musicale. Pour se faire, on doit composer de manière différente avec chacun d’entre eux.

Photo : Julien Mignot

Quelle est justement votre définition de l’interprétation, cette crête ténue entre le texte presque sacralisé et ce qu’insuffle le musicien de sa propre personnalité ?

Ma règle de base dans l’interprétation, c’est d’abord une très grande humilité. Il ne faut pas oublier que nous sommes simplement des interprètes et non des créateurs. Il ne s’agit donc pas de créer une pièce mais de lire vraiment un texte, de le comprendre, de se l’approprier et surtout de respecter ce qui est écrit. Parfois, figurent sur le texte de nombreuses indications d’une grande précision. Il faut alors tenter de retranscrire le plus justement possible tout ce qui est noté. Après, forcément, on y apporte qui l’on est, sa patte, sa personnalité comme on le disait tout à l’heure. Nous ne sommes pas toutes et tous obligés d’avoir la même compréhension du texte. Il y a cette adéquation entre l’étude d’un texte, la réflexion que l’on peut avoir dessus et cette part intuitive où, à mon sens, intervient la plus grande part de l’interprétation. Il convient de mettre en exergue cette part d’intuition, de ressenti par rapport à une pièce mais sans jamais perdre de vue le texte qui est la clé de voute, l’élément clé et central. Nous ne sommes pas au même niveau que les compositeurs pour lesquels j’ai un immense respect et une profonde admiration pour ainsi partir de rien et parvenir à nous écrire des choses sublimes. On se doit d’être au service des pièces et non s’en servir pour se mettre en avant.    

Peut-on dire que dans le violoncelle, la main droite est l’interprétation, le son là où la main gauche se « résume » au texte ?

Tout à fait. La main gauche, ce sont les notes, les mots écrits. La main droite, elle, fait tout puisqu’elle va apporter les articulations, les couleurs, les nuances, les inflexions, les respirations… Les deux mains ont des rôles très différents mais complémentaires. On a par ailleurs, nous instrumentistes à cordes, cette petite arme magique qu’est le vibrato, un peu comme les chanteurs ; chose dont ne disposent pas les pianistes par exemple. Vous pouvez très bien jouer très fort avec votre main gauche, ce n’est pas pour autant que cela apportera une nuance. C’est ce que je répète souvent à mes élèves d’ailleurs : « Soyez tout le temps dans votre main droite qui est votre musique, votre inspiration, le chef d’orchestre de l’instrumentiste à cordes. »

Photo : Julien Mignot

Vous avez croisé le chemin des maîtres Paul Tortelier et Janos Straker au château de Villarceaux. Starker vous avait d’ailleurs fait une remarque pour le moins violente concernant la position de votre corps. Cette réflexion du maître vous a-t-elle fait revoir complètement votre posture au violoncelle et donc modifier votre jeu ?!

À cet âge, je jouais de manière naturelle et n’avais jamais vraiment réfléchi à la posture du corps. À cette époque, il faut savoir que l’on ne se focalisait pas sur la posture dans son ensemble mais simplement sur de petits détails comme : « lève le coude, baisse le bras, ne casse pas tes doigts… » Aujourd’hui, la posture de jeu est au cœur des débats et c’est quelque chose sur laquelle je me focalise, faisant même intervenir dans mes cours une kinésithérapeute qui vient parler à mes élèves de ce qu’est une bonne assise. Me concernant, il est vrai que la remarque de Starker a agi comme un électrochoc. Après cela, j’ai passé plus d’un an à totalement revoir ma posture de jeu, à prendre conscience de mon assise, de ma respiration. Ça a été un vrai tournant dans ma vie de violoncelliste et une chose à laquelle je pense encore aujourd’hui tous les jours et que je partage avec mes élèves comme avec mes amis musiciens.  

Cette modification de votre posture a-t-elle influé sur votre son ?

Mieux on est assis, plus on est relâché au niveau du corps et plus le son se libère. Je vois souvent de jeunes musiciens jouer avec beaucoup de force, de tension et le dos complètement vrillé. D’abord, je les mets toujours en garde car s’ils souhaitent faire ce métier longtemps, il faut en premier lieu préserver son corps. J’insiste donc beaucoup sur la respiration et la bonne assise qui participent au fait que l’on entretient son corps et que l’on génère un son très différent en ce sens qu’il n’a pas besoin de force pour s’exprimer mais d’un grand relâchement corporel.

Photo : William Beaucardet

Même s’il existe une grande tradition française du violoncelle, on a vraiment cette impression que, dans l’histoire de cet instrument, il y a un avant et un après Rostropovitch. Rostropovitch a-t-il révolutionné l’image du violoncelle, incitant presque tous les compositeurs à écrire un concerto pour cet instrument qui, auparavant, était quelque peu au second plan ?!

On a certes eu Casals avant Rostropovitch mais on était quand même dans un rapport plus intimiste, plus intérieur, plus effacé de l’instrument avec cette image du violoncelliste introverti. Rostropovitch est venu complètement bousculer cette vision-là. Il était en effet complètement à l’inverse de ça avec un jeu bouillonnant, tourné vers l’extérieur et il a mis un grand coup de pied dans ce qu’était jusque-là la manière d’aborder l’instrument et de jouer du violoncelle. Rostropovitch était tellement hors norme et extraordinaire qu’il a fasciné beaucoup de compositeurs. C’est pour cette raison qu’on lui doit la quasi-totalité du répertoire pour violoncelle du XX ème siècle. Ma gratitude à son égard est infinie. Jeune violoncelliste, il me fascinait totalement avec un jeu qui semblait si facile, fluide, évident et une personnalité incroyable. Rostropovitch avait une manière d’appréhender le son totalement novatrice avec une puissance phénoménale.

Pierre-Laurent Aimard, Claire Désert, Philippe Cassard… vos collaborations naissent-elles d’abord d’une admiration musicale ?

Je n’arrive pas à partager la musique avec des gens que je n’aime pas. Mes collaborations sont donc avant tout des histoires d’amitié, teintées de beaucoup d’admiration, pas forcément pour le musicien mais pour la personne telle qu’elle est. Vous citiez Pierre-Laurent Aimard, Claire Désert et Philippe Cassard. On est là avec trois personnalités totalement différentes et des univers distincts. Je mets toujours beaucoup d’affect, d’amitié, de confiance dans ces projets. Ce sont là des éléments primordiaux pour faire la musique comme j’aime, une musique basée sur ce sens de la rencontre, du partage.

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En 2008, vous enregistriez les célèbres suites de Bach qui sont un passage presque obligé, une sorte de consécration pour tout violoncelliste. Comment aborde-t-on une telle montagne sacrée ?

C’est compliqué ! Quoiqu’il en soit, les Suites de Bach font partie intégrante de la vie d’un violoncelliste. Ce sont des pièces que j’ai travaillées très tôt et que j’ai beaucoup jouées. Après, je vous avoue que lorsque l’on se lance dans un enregistrement d’une telle ampleur, il y a une part d’inconscience. Dans l’approche, j’étais dans l’écoute de mon envie de laisser une trace à un moment donné en me disant : « Qu’est-ce que je souhaite dire dans ces Suites à ce moment-là ? » C’était un instantané et je pense que depuis les choses ont beaucoup évolué. Je n’écoute pas mes disques et aurais donc du mal à savoir à quoi cela ressemble maintenant. Je pense qu’aujourd’hui je regarderais cela avec un amusement mêlé de tendresse. Même si le musicien ne cesse d’évoluer tout au long de sa vie, cette expérience des Suites de Bach demeure quelque chose d’incroyable. J’ai beaucoup appris sur moi-même durant cet enregistrement car il est vrai que j’aime bien profiter de ces moments en studio pour tenter des choses que je ne fais pas forcément à la maison. Je ne sais pas si ses Suites de Bach sont un passage obligé mais je crois surtout que l’on a tous envie de s’y confronter un jour dans notre carrière de violoncelliste pour en garder une trace.

Les œuvres contemporaines, c’est le plaisir de sortir du texte en interagissant directement avec le compositeur qui vous aiguille tout en vous laissant une certaine part de liberté. Est-ce ce rapport direct avec le compositeur qui vous anime dans la musique contemporaine ?

C’est surtout dû au fait que j’aime toutes les musiques et ce peu importe l’époque. J’en préfère certaines à d’autres mais la période elle n’entre nullement en considération. J’ai toujours eu cette envie de me confronter un peu à tout et surtout à ne pas me cantonner dans un seul et unique répertoire. En musique, je fonctionne beaucoup aux coups de cœur dans mes choix. Dans la musique contemporaine, comme vous le notiez, le fait de pouvoir communiquer directement avec le compositeur est un paramètre simplement génial. J’aurais rêvé de pouvoir rencontrer Beethoven, Brahms ou Schubert ! Alors quand on a cette possibilité d’échanger avec les compositeurs d’aujourd’hui sur leurs partitions, savoir ce qu’ils ont voulu dire, ce qu’ils souhaiteraient entendre, c’est un échange qui nourrit merveilleusement. Ce qui m’a toujours attendrie, c’est cette grande liberté que nous laissent les compositeurs actuels. Ils ont forcément, pendant l’écriture, quelque chose de précis en tête. Lorsque nous interprètes en avons compris une autre et la leur proposons, on s’aperçoit que, souvent, ils abondent en notre sens. C’est quelque chose de très rassurant vis-à-vis d’un répertoire plus ancien où l’on se dit que finalement si Beethoven avait entendu ce que j’ai compris d’une de ses partitions, il aurait peut-être lui aussi trouvé que c’était là une idée intéressante.

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